De l'importance des zones humides
Une zone humide est un espace inondé ou gorgé d’eau, de manière permanente ou temporaire.
Le territoire du Parc national en compte plus de 2 000 cartographiées dont 2/3 sont des prairies humides ou des tourbières.
Elles ont des propriétés très utiles pour le bon fonctionnement des écosystèmes mais aussi pour les activités humaines :
- l’atténuation des crues et des inondations : la zone humide absorbe l’eau et freine sa circulation
- le maintien de la qualité des eaux : la zone humide peut agir comme un filtre mécanique et biologique via l’activité des bactéries ou de la flore
- la réduction des sécheresses et des canicules : la zone humide absorbe l’eau dont une partie va s’infiltrer et alimenter les nappes phréatiques. Durant l’été, cette eau fraiche peut soutenir les débits des cours d’eau
- le stockage du carbone : la zone humide absorbe et emmagasine les molécules carbonées notamment par le biais de la végétation vivante ou décomposée
Les zones humides accueillent également une biodiversité exceptionnelle : plus de 50 % des espèces d’oiseaux en dépendent et 30 % des espèces végétales remarquables et menacées en France y sont inféodées.
Or il y a urgence car ces zones humides disparaissent trois fois plus vite que les forêts et constituent l’écosystème le plus menacé.
En 50 ans seulement, soit depuis 1970, 35% des zones humides de la planète ont disparu. Depuis le 18ème siècle, ce chiffre sélève à 85% *.
Les tourbières : des zones humides à protéger
Les tourbières sont des zones humides remarquables à plus d’un titre.
Le sol y est saturé d’eau en permanence et privé d’oxygène. Ces conditions ralentissent l’action des bactéries et des champignons, responsables de la décomposition et du recyclage de la matière. Il en résulte une accumulation de litière végétale et de débris organiques partiellement décomposés.
Le résultat ? Si en forêt, par exemple, le niveau du sol reste assez stable, le sol d'une tourbière a quant à lui plutôt tendance à monter !
Les tourbières évoluent très lentement et ont des origines qui remontent à la dernière glaciation (environ 12 000 ans).
Cette grande inertie accentue leur sensibilité et, en cas de forte dégradation (drainage, exploitation, plantations, pollution...), leur restauration peut s’avérer impossible.
Le Parc national des Cévennes compte plus de 1000 zones tourbeuses, situées principalement sur le Mont Lozère et le Mont Aigoual. 1/3 des zones humides du territoire du Parc sont des tourbières.
Cet environnement qui, à première vue, pourraient être qualifié d’hostile, favorise une faune et une flore très spécialisées.
Les mousses et en particulier les sphaignes sont des éléments essentiels de cet habitat.
Elles contribuent à la formation de la « tourbe » ; une sorte de matériau végétal fossilisé qui a longtemps été utilisé comme combustible.
Dans le monde, les tourbières ne couvrent que 3 % des terres émergées mais contiendraient 30 % de toute la matière organique, soit l'équivalent de 50 % du CO2 atmosphérique.
Dans un contexte de changement climatique, la préservation et la restauration des zones humides s’impose donc plus que jamais comme une priorité !
Dans le Parc national des Cévennes, les tourbières et autres zones humides accueillent des espèces comme le Rossolis à feuilles rondes (ou Drosera), le Criquet ensanglanté, la Vipère péliade, la Leucorrhine douteuse ou le Sympétrum noir (libellules), la Grenouille rousse ou encore le Lézard vivipare
Carotter pour mieux comprendre l’avenir et le passé
Pour toutes ces raisons, l'étude des tourbières est fascinante.
En effet, "carotter" une tourbière est une sorte de voyage dans le temps qui permet de comprendre l'histoire des lieux.
Le carottage consiste à faire prénétrer dans le sous-sol un tube appelé carottier afin de prélever un échantillon du sol. L'échantillon ainsi obtenu s'appelle une carotte.
Dans une tourbière, où, comme nous l'avons vu, l'accumulation des couches organiques est très peu modifiée au cours du temps, l'analyse de la carotte permet par exemple de déterminer avec précision le type de végétation qui existait auparavant.
Elle permet également d'étudier les variations climatiques passées, leur impact sur la faune et la flore et d'en déduire ceux qui pourraient advenir.
Sur le mont Lozère, on trouve par exemple du pollen de blé qui permettent d'en déduire la présence de l'homme et ce qu'il cultivait au cours des siècles passés.
On trouve également des traces de cultures sur brulis qui remontent au néolithique, au début de la sédentarisation, ou encore des écorces de Chêne (- 2500 à
- 800 avant J.c.) qui ont laissé peu à peu la place au Hêtre sous l'influence d'un climat plus humide et frais.
Avec le changement climatique, on estime que les tourbières du Parc national des Cévennes pourraient être les premières à disparaitre du fait de leur basse altitude et de leur proximité avec le climat méditerraénéen.
Il est donc grand temps d'agir pour les protéger et éviter - entre autre - qu'elles ne relâchent tout le CO2 qu'elles ont accumulé au fil du temps !
Pour aller plus loin :
- Les milieux humides du Parc national des Cévennes
- La ressource en eau du Parc national des Cévennes
- La journée mondiale des zones humides
* Source : IPBES, 2019. Global assessment report on biodiversity and ecosystem services of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services.