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Transhumances dans le Parc national des Cévennes

 

estive
Estive sur le mont Lozère © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

Chemins à travers les âges. Des liens étroits entre nature, troupeaux et berger.e.s 

La transhumance dans les Cévennes est une tradition qui se perpétue depuis des millénaires dont les origines, intimement liées au pastoralisme, remontent à environ 2 000 ans avant notre ère. 

 

Transhumants
Bergers transhumants de Malavielle dans les années 80 © Michelle Sabatier - Parc national des Cévennes

 

Du latin trans (à travers, au-delà) et humus (la terre, le sol), elle se définit comme le déplacement saisonnier des troupeaux, généralement des ovins et des bovins, d’un lieu à un autre afin de se nourrir. 

Ainsi, chaque année au début de l’été, une partie des troupeaux guidés par les éleveurs et bergers partent depuis les plaines du Languedoc mais aussi des vallées plus proches jusqu’aux sommets des massifs du Mont-Lozère, du Bougès et de l’Aigoual ;  quittant les parcours asséchés pour les hauts pâturages afin de profiter d’une herbe plus riche et d’un climat plus frais.

 

Les drailles, chemins de la transhumance 

Les Cévennes sont l’un des derniers endroits en France où la transhumance se fait encore à pied même si une partie utilise aujourd’hui des camions bétaillère pour avancer les animaux. Les troupeaux se réunissent au cours de l’ascension sur des chemins spécifiques que sont les drailles. Indispensables pour la transhumance à pied, elles font partie du patrimoine historique et identitaire du Languedoc. Elles sont jalonnées par une multitudes petits bâtis (murs de soutènement, calades, menhirs, montjoies,…). 

 

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Draille de l’Aubaret © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes

 

Les plus grandes drailles, les collectrices sont reliées par un vaste réseau de drailles secondaires, le tout formant un maillage de près de 800 km. Certaines sont aujourd’hui des chemins de grandes randonnées qui permettent d’assurer un relatif entretien, d’autres ont été en partie réaffectées vers un autre usage (routes, pistes forestières,...). De nombreux tronçons se dégradent, devenant une source d’inquiétude pour les éleveurs qui en dépendent. 

 

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GR 6-67 du col de l'Asclier à Bonperrier - Draille de transhumance © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes


Le marquage et l’ensonnaillage 

A l’occasion de ces marches qui représentent pour les plus longues un trajet de 100 km, une partie des brebis est ornée de sonnailles de transhumance (en occitan : dralhaus), de pompons en laine colorée et d’un marquage aux initiales du propriétaire. 

 

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Transhumance au col de l'Asclier  © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes

 

La tradition de l’ensonnaillage des bêtes revêt un aspect culturel et festif, en particulier lors des traversées des villages où la population sort pour regarder passer le troupeau. Ces sonnailles spécifiques permettraient aussi de stimuler et rythmer la marche des animaux. Elles sont retirées une fois le troupeau arrivé à destination puis remises pour la descente. 

 

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Troupeau transhumant sur l'Aigoual © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes

 

L’estive 

Les animaux vont rester sur les pâturages d’altitude de juin à août c’est ce que l’on appelle l’estive. Dans les Cévennes on retrouve des estives occupées par des ovins, environ 20 000 têtes venant du Gard (56%), de Lozère (30%) et de l’Hérault (14%) et des estives bovines, environ 2000 têtes, essentiellement occupées par des éleveurs locaux.

 

Estive
Estive au sommet de Finiels sur le mont Lozère © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

Tous ces troupeaux répartis sur plus 6 700 ha d’estives permettent le maintien d’espaces ouverts porteurs d’une biodiversité et de paysages remarquable. En estives, les animaux sont gardés par des bergers dont certains sont eux-mêmes éleveurs. Sur le territoire du Parc national, on dénombre ainsi plus de 25 bergers et aides bergers

Chaque soir, les brebis de l’estive sont rassemblées dans un parc de nuit souvent à proximité de la cabane ou dort le berger ou la bergère.  Ce parc de nuit est balayé les jours de beau temps afin de récolter un fumier très sec et très riche appelé Migou. Les bergers le mettent en sac et le vendent aux viticulteurs et maraîchers des plaines. 

 

Chien de conduite
Chien de conduite de troupeau sur le mont Lozère © Caroline Devevey - Parc national des Cévennes

 

Une tradition ancestrale, patrimoine culturel immatériel

Bien plus qu’une tradition ancestrale, la transhumance est un mode de vie dont l’importance culturelle et socio-économique repose sur la transmission de connaissances et de savoir-faire. De fait, elle contribue de manière significative à l’économie locale, à la préservation des paysages ouverts et de la biodiversité liée.

 

crave à bec rouge
Le crave à bec rouge fait partie des nombreuses espèces qui dépendent des milieux ouverts créés par le pastoralisme © Régis Descamps - Parc national des Cévennes

 

A ces égards, la transhumance a été inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO en décembre 2023. Cette reconnaissance s’accompagne d’un plan de sauvegarde pour assurer le maintien de la transhumance et du pastoralisme comme des pratiques traditionnelles mais toujours tournées vers l’avenir en étant porteuses de solutions pour répondre par exemple au changement climatique.

 

Le Parc national des Cévennes soutient la transhumance 

Le Parc national mène depuis sa création en 1970 des actions pour maintenir la transhumance et plus largement le pastoralisme. Le Parc a travaillé en étroite collaboration avec les chambres d'agriculture et les groupements pastoraux pour revitaliser cette pratique et stabiliser les effectifs ovins transhumants. En 1977, seulement 10 000  brebis transhumaient encore

 

mediateur pastoral
Une bergère et un médiateur pastoral du Parc national des Cévennes échangent en 2024 sur le mont Lozère © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

  • Actions sur le foncier : 

D’abord par l’acquisition d’une partie des terres utilisées comme estives, garantissant ainsi leur usage pour les éleveurs via des conventions pluriannuelles de pâturage. Près de 2000 ha (28 % des surfaces d'estives du territoire du Parc national des Cévennes) sur les 3700 ha de surface agricole qui appartiennent à l'établissement sont mis à disposition des bergers-bergères via des conventions pluriannuelles de pâturage (CPP) aux groupements pastoraux avec des loyers très faibles. 

 

  • Aides directes : 

Le Parc national accorde des subventions directes pour la valorisation et le développement du pastoralisme et notamment le soutien des actions sur les estives. Ces dernières années, il a porté la construction et réfection de 12 cabanes pastorales sur les estives pour permettre aux bergers de vivre et de travailler dans de meilleures conditions. Il intervient aussi sur les autres équipements nécessaires au maintien du pastoralisme.   

 

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Cabane pastorale des Laupies à Dourbies © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes

 

  • Accompagnement technique : 

L’établissement assure également un accompagnement technique avec les partenaires : Copage et les Chambre régionale d'agriculture d'Occitanie et du Gard et propose des actions et des fiches pratiques sur la gestion du pastoralisme.  

 

  • Mesures de protection face à la prédation : 

Face aux risques de prédation, le Parc national contribue à la mise en place des mesures de protection et d’accompagnement des éleveurs et des bergers dans le cadre du Plan national d’action Loup

Sur le territoire, les agents participent aux suivis et prélèvement d’indices de présence de canidés et interviennent en cas d’attaque sur les troupeaux pour réaliser les « constats de dommages ». La première année, il finance également en partie l’intervention d’un berger d’appui qui vient en aide au berger en place par exemple lorsque les troupeaux sont menacés par des attaques. 

Le Parc national recrute chaque été sept médiateurs pastoraux pour sensibiliser les promeneurs, cyclistes,… aux bons comportements à adopter avec les chiens de protection des troupeaux. 

Enfin l'établissement organise des formations et des réunions d'échanges avec l'Institut de l'élevage (Idele) sur les chiens de protection.
 

 

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Médiateurs pastoraux et berger au sommet du mont Aigoual © Adrien Majourel - Parc national des Cévennes

 

  • Accès aux aides agro-environnementales : 

En partenariat avec les acteurs du territoire, le Parc national coordonne le déploiement d’aides européennes appelées Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC) qui sont des contrats de 5 ans. Tous les groupements pastoraux du territoire du PNC bénéficient de ces aides en contrepartie de l’entretien et de la préservation d’habitats à forte valeur écologique
 

 

Pour aller plus loin :

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Transhumance au col de l'Asclier © Olivier Prohin - Parc national des Cévennes