Par son approche sensible, la création artistique est un vecteur privilégié pour sensibiliser le public à la préservation de l’environnement ou susciter l’émerveillement devant les richesses exceptionnelles que recèlent les parcs nationaux. Les établissements publics investissent le monde de l’art faisant de leurs territoires de véritables espaces de création.
En septembre, dans les Cévennes, la création artistique a fait l’objet d’une rencontre professionnelle entre parcs nationaux, associant plusieurs parcs régionaux et le ministère de la Culture. « Il est essentiel que la création artistique se manifeste sur l’ensemble du territoire. Le Ministère a lancé le plan culture et ruralité et les parcs nationaux sont aussi les acteurs de cette politique », indique Maxime Gueudet, chargé de mission pour la transformation écologique à la direction générale de la création artistique (DGCA) du ministère de la Culture. Et de préciser que « les artistes sont également des acteurs de la transformation écologique aux côtés des parcs naturels ».
Dans les Cévennes, le recours à la création artistique, engagé depuis longtemps, s’est notamment traduit ces dernières années par le lancement d’appels d’offres pour des résidences artistiques, avec des partenaires institutionnels (association interparcs du Massif central), culturels, avec les Scènes nationales du Gard et de la Lozère, ou des tiers-lieux, à l’image de La Filature du Mazel. Ces résidences d’artistes ont pu donner naissance à des œuvres sonores sur la vie des habitants du mont Lozère que l’on écoute sur un chemin de grande randonnée (Vadrouïlle), des spectacles interrogeant notre rapport au vivant (Dialogues de plantes), ou encore à la composition d’un almanach théâtralisé consacré au changement climatique sur l’Aigoual. « Nous partageons le constat que l’intérêt de la création artistique dans les parcs nationaux ne se résume pas à une portée esthétique, mais réside aussi dans le processus de transmission de récits communs collectivement élaborés autour de la problématique des changements climatiques », résume Eddie Balaye, chargé de mission valorisation des patrimoines au Parc national des Cévennes.
Le Land’art pour découvrir la forêt
La création plastique trouve également sa place dans les cœurs de parcs nationaux. Ceux-ci étant soumis à une réglementation particulière, elle doit respecter un cahier des charges très strict notamment sur le choix des matériaux et faire l’objet d’une autorisation de travaux. Ainsi, au départ de la station de Prat Peyrot, les Balcons de l’Aigoual, un parcours Land’art de 7 km, initié en 2018 et régulièrement renouvelé jusqu’en 2024, permet de découvrir des œuvres s’inspirant de la nature et des paysages.
Le Parc national de Forêt a également fait ce choix en 2021. « Nous étions en période post-covid, les visiteurs avaient besoin de se reconnecter à la nature. Nous souhaitions leur proposer de faire un pas de côté », explique Baptiste Quost, chargé de mission patrimoine culturel. Près de Châteauvilain, en cœur de Parc, La Belle balade propose un cheminement de 3,5km en forêt. Le parcours est jalonné de 13 œuvres, monumentales pour certaines, qui sont autant d’éléments d’interprétation des patrimoines. Installées en clairière, dans la canopée ou en bord de chemin, chacune entre en résonance avec son lieu de création. « La création artistique qui est à mon sens complémentaire de la médiation scientifique ou naturaliste force au dialogue et interroge sur la place de l’humain dans la nature et notre relation au vivant ».
Sensibiliser avec légèreté
Si la création artistique permet une découverte sensible des patrimoines naturels, elle permet aussi de sensibiliser le public à sa préservation. Dans le Parc national des Calanques, visité chaque été par 3 millions de personnes, les équipes ont dû rivaliser d’imagination pour sensibiliser les visiteurs aux bons gestes à adopter. « En 2021, nous avions constaté une recrudescence d’infractions liées aux déchets, à la cigarette et à la pollution sonore. Les visiteurs n’étaient pas suffisamment équipés pour descendre dans les calanques », explique Magali Veyrat, chargée de mission interprétation des patrimoines et des projets socio-culturels. Pressés de descendre sur les plages, les visiteurs prenaient soin d’éviter le stand où les 2 saisonniers du Parc, en uniforme, étaient chargés de délivrer des conseils.
Pour capter le flux des vacanciers, l’établissement a choisi de mettre en première ligne un binôme d’artistes de rue, les éco-médiens. Reconnaissables à leur t-shirt jaune, leurs jupes à paillettes et leur nez de clown, ils interpellent directement les vacanciers, de façon ludique, décalée et improvisée. « Ce dispositif est une réussite, car les visiteurs ne se braquent pas et les messages sont bien reçus ».
Si l’ouverture sur la création est un objectif porté par les parcs nationaux, chaque territoire se distingue par ses spécificités, donnant lieu à des pratiques artistiques et des approches diverses. Par ailleurs, la culture vivante qui s’épanouit dans certains parcs nationaux véhicule une dimension immatérielle qui est indissociable de la création. Et rappelons que la création peut exister en tant que telle, sans forcément être un médiateur. L’art pour l’art.
Cet article est extrait du dernier numéro du magazine du Parc de serres en valats. Son Grand angle s'intéresse aux impacts potentiels du changement climatique sur la forêt.
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